[ITW] Lionel Bertrand : “En France, le chantier de la rénovation énergétique est encore devant nous”

Vincent Bryant
Date06 octobre 2016

Responsable de la division Innovation-Développement au Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB), Lionel BERTRAND partage en exclusivité pour Le Blog de Deepki sa vision du marché de la rénovation et de l’amélioration de la performance énergétique. Il nous donne également son point de vue sur l’impact de l’utilisation de la data sur le chantier de la rénovation.

Quels sont les chantiers menés actuellement par le CSTB ?

LB : Au CSTB, notre objectif est d’accompagner les gestionnaires de parc immobilier vers la transition énergétique. L’enjeu principal est la rénovation énergétique de l’ensemble des bâtiments existants.
Nous essayons d’être une aide à la décision en mettant face à face le potentiel de gains de performance et l’effort de rénovation à produire pour l’atteindre. Pour ce faire, nous tentons de répondre à différentes questions :

  • Que faire avec son parc pour atteindre ses objectifs ?
  • Quelles sont les solutions techniques pour mobiliser ces gisements ?
  • Quelles actions prioriser ?

Notre réflexion comprend différents champs d’actions : l’enveloppe du bâtiment, les systèmes et équipements énergétiques embarqués, l’exploitation du bâtiment (régulation, actions de maintenance…) et également le comportement de l’occupant.

Avez-vous le sentiment que la data peut venir jouer un rôle dans la transition énergétique ?

LB : C’est en effet une des grandes tendances du moment. Elle va de pair avec un changement de mentalités qui se traduit par une transition d’une obligation de moyens vers une obligation de résultats. Je m’explique. Pour appréhender des phénomènes aussi variés que complexes, les simples équations et les simulations ne suffisent plus. Il faut de la donnée, du concret !

L’approche physique a mis en évidence, grâce à la simulation, toute une série de phénomènes qu’on avait du mal à expliquer ou analyser tant ils étaient divers.

Les données et les modèles statistiques permettent de se substituer à la connaissance des phénomènes fondamentaux. Grâce à eux, on peut prédire, anticiper, quantifier des phénomènes sans être obligés de comprendre précisément leurs déterminants. Cela nous a permis de repousser les limites. Mais l’utilisation d’une approche n’exclut pas l’autre. Ce sont des méthodes très complémentaires avec pour résultats une capacité à anticiper, cerner au mieux les phénomènes, pour avoir au final des modèles prédictifs au service de l’aide à la décision, du dimensionnement, ou d’évaluation de la performance.

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Quels résultats observez-vous actuellement sur cet enjeu de transition énergétique ?

LB : J’ai la nette impression que l’on peut mieux faire et que le chantier, en France, est devant nous.

Grâce à l’utilisation de la data et à la nouvelle façon d’appréhender les choses qu’elle implique, nous commençons tout juste à envisager de nouvelles solutions pour accélérer la transition énergétique. Mais en dépit des effets d’annonce sur la capacité à faire des choses très performantes, et bien que certains y arrivent, la réalité est que les objectifs ne sont toujours pas tenus.

Quelles sont les bonnes pratiques que vous recommandez ?

LB : Il ne faut pas se limiter dans l’approche de la performance. Que l’on soit en production ou en rénovation, il est important d’avoir un dispositif de retour d’expérience pour confronter la réalité aux objectifs initiaux. La mise en place de cette boucle nécessaire va accélérer considérablement la progression du savoir-faire ! Elle est nécessaire pour mettre en évidence plein d’erreurs majeures issues de fausses bonnes idées. Il faut accepter que les techniques de construction traditionnelles ont leurs limites et se remettre en question en permanence.